Vous faites de la formation et vous êtes à la recherche de stratégies pédagogiques ou de méthodes d’enseignement ? Je vous présente trois méthodes pédagogiques efficaces pour dynamiser votre enseignement, mais à utiliser avec certaines nuances!
LE JIGSAW
BUT:
La méthode Jigsaw est une approche collaborative qui favorise l’appropriation de la matière chez les apprenants et la transmission d’une certaine expertise aux collègues.
COMMENT:
Étape 1 :
Divisez votre classe en petits groupes de trois à cinq personnes et attribuez-leur une lettre. Par exemple, pour un groupe de 20 personnes, vous aurez quatre équipes de cinq personnes. Vos équipes A, B, C et D sont vos groupes experts. On les nomme « experts » puisque vous devrez leur attribuer une « expertise » à développer. Une façon simple de le faire est de leur donner un texte à lire sur le sujet d’expertise en question. Tous les « A » liront le même texte de façon individuelle alors que tous les B liront un autre texte et ainsi de suite. Il est important que les différents textes soient liés à une même thématique.
Étape 2 :
Rassemblez vos experts et faites les discuter. Cette étape est essentielle pour valider la compréhension du texte lu. Selon la longueur et la complexité du texte, cette étape peut durer facilement une quinzaine de minutes. En tant que formateur, votre rôle est de circuler dans les équipes d’experts et de vous assurer qu’ils ont bien compris les textes. Vous pouvez leur poser des questions, faire quelques relances à partir des éléments du texte ou répondre à leurs questions. Vous agissez ici un peu comme un coach. Assurez-vous de prendre le temps d’aller rencontrer chacune des équipes!
Étape 3 :
Maintenant que vos experts ont validé leur compréhension, ils doivent maintenant relever le défi de partager leurs nouvelles connaissances avec leurs collègues. Vous devez former de nouvelles équipes qui comprennent un membre de chaque groupe d’experts. Vos équipes seront donc formées d’un A, d’un B, d’un C et d’un D. Chaque expert doit expliquer ce qu’il a appris à ses collègues et répondre à leurs questions. Cette étape est cruciale puisqu’elle permet d’assembler toutes les pièces du casse-tête, c’est-à-dire les différents textes, afin d’obtenir une vue d’ensemble. Les apprenants seront aussi plus engagés dans l’activité puisqu’ils savent que leurs collègues dépendent d’eux pour apprendre le contenu. Cette activité se termine une fois que tous les experts ont partagé leurs connaissances. À cette étape-ci, le formateur circule dans les nouvelles équipes et peut faire des relances et répondre à des questions.
Cette méthode permet aux apprenants d’être très actifs dans leurs apprentissages. Ils doivent s’approprier les contenus et les transmettre, ce qui favorise une meilleure rétention des apprentissages et une compréhension plus avancée du sujet. Il est plus complexe de partager des connaissances aux autres que de seulement lire sur un sujet. Un sentiment de fierté peut également se développer grâce à la belle contribution apportée au groupe. C’est une méthode de co-apprentissage très puissante.
QUELQUES LIMITES:
Les apprenants experts s’approprient un contenu mais il faut être conscient que les « A » maîtriseront beaucoup mieux le contenu « A » à la suite de l’exercice que celui présenté par les « B », « C » ou « D ». Dans un tel contexte, les apprenants maîtrisent bien 25% du contenu et se sont fait expliquer 75% du reste du contenu. Il ne faut toutefois pas paniquer avec ça puisque dans un cours d’enseignement magistral c’est 100% du contenu qui est expliqué. Aussi, il faut utiliser cette stratégie avec parcimonie. J’ai moi-même été victime d’une « overdose » de Jigsaw dans un cours où c’était pratiquement la seule stratégie pédagogique mise en place. De la lecture, on a en fait… mais vraiment trop! L’efficacité n’était plus à son plein potentiel. Malgré ces petits bémols, cette stratégie est excellente pour dynamiser la classe, activer les apprenants et développer des habiletés à transmettre de l’information.
LA CLASSE INVERSÉE:
La classe inversée est une stratégie d’enseignement de plus en plus populaire dans les écoles. Toutefois, la classe inversée peut également être pratiquée dans certaines organisations qui offrent de la formation.
BUT :
Optimiser le temps passé en présence du formateur pour mettre en pratique le contenu appris.
COMMENT :
En résumé, la classe inversée consiste à ce que la théorie soit enseignée à la maison, souvent par le biais de vidéos ou de lectures alors que la pratique, c’est-à-dire les exercices ou les devoirs, est réalisée en classe. La partie théorique est présentée au rythme de l’apprenant. Il peut faire des pauses s’il ne comprend pas certains aspects et réécouter certains segments si la classe inversée est réalisée avec des vidéos. L’utilisation de vidéos est la méthode la plus populaire pour les classes inversées puisqu’elles peuvent être produites avec peu de matériel.
On parle souvent de cette approche dans les écoles, mais je crois qu’elle a un fort potentiel dans plusieurs organisations qui offrent de la formation. Souvent, on prend beaucoup de temps du cours à expliquer des concepts théoriques alors qu’il manque de temps pour les mettre en pratique. Les principes de la classe inversée viennent justement donner plus de temps pour la pratique puisque c’est souvent à ce moment que les apprenants réalisent qu’ils ont des difficultés. Combien de fois vous êtes-vous retrouvé à la maison ou dans un contexte professionnel et que vous avez réalisé que vous n’avez pas compris un concept enseigné ? Dans une classe inversée, le formateur et les autres apprenants sont présents pour s’entraider quand une personne ne comprend pas les exercices pratiques. On favorise généralement le travail en équipe dans cette optique d’entraide. Le formateur circule dans les groupes, répond aux questions et valide la compréhension des apprenants.
Cette méthode peut s’avérer utile lorsque les apprenants ont besoin de pratiquer quelque chose de concret dans la classe comme des interventions auprès de patients ou des stratégies de vente auprès de clients pour ne donner que quelques exemples. L’idée est de maximiser le temps de classe pour la pratique entre les pairs puisque les apprenants ont vu le contenu à l’extérieur du temps de classe.
QUELQUES LIMITES:
J’ai discuté avec plusieurs étudiants qui ont vécu des expériences de classes inversées. En général, ils apprécient cette méthode d’enseignement. Toutefois, plusieurs d’entre eux mentionnent qu’ils souhaitent ne pas avoir tous leurs cours en mode classe inversée. La charge de travail est assez importante et ils préfèrent parfois avoir quelques moments plus passifs pendant le cours. Ils doivent aussi être assez motivés pour faire le travail préparatoire avant de se présenter en classe. Je ne vous cacherai pas non plus que la préparation d’une classe inversée est un travail de longue haleine pour le formateur. C’est très demandant, mais plusieurs formateurs qui l’expérimentent n’ont plus le goût de revenir en arrière! Allez-vous prendre ce risque de devenir accro ?
ÉTUDE DE CAS
BUT :
L’étude de cas permet de plonger l’apprenant dans une situation authentique, ce qui favorise la rétention et le transfert des connaissances. Mais au fait, c’est quoi une situation authentique ? C’est une situation semblable au contexte dans lequel l’apprentissage devra être mis en pratique. Par exemple, quand on apprend la conduite automobile, la situation authentique est de conduire ladite automobile. Toutefois, il n’est pas toujours possible de faire une activité pédagogique dans un contexte aussi identique à la réalité. Quand ce genre de situation se présente, j’aime bien proposer une étude de cas.
COMMENT :
Cette stratégie consiste à présenter un cas réel ou inventé (si le cas est inventé, il doit être le plus près possible d’un cas qui pourrait exister). On peut présenter le cas sous forme d’une vignette, un exposé magistral ou tous les autres moyens qui informent les apprenants sur les différents aspects du cas à étudier.
Cette activité peut être relativement courte ou longue selon la complexité du cas et elle peut se réaliser en équipe. Chacune des équipes analyse le cas et propose un diagnostic ou des solutions. Ensuite, les équipes présentent leurs conclusions à l’ensemble du groupe. En tant que formateur, votre rôle est d’alimenter les discussions et de vous assurer de faire un résumé des solutions proposées et de leur efficacité. Il est toujours intéressant de constater la diversité des conclusions entre les équipes qui varient selon l’expérience et le vécu de chacun des membres. Il est très important de faire un retour sur les différentes idées qui ont émergé et de les nuancer afin que les apprenants puissent mieux distinguer les avantages et les faiblesses des réponses proposées. Sans ce retour du formateur, les apprenants sont souvent confus et ils n’arrivent plus à distinguer ce qu’ils doivent retenir ou conclure de cette activité. L’étude de cas peut aussi être donnée à la fin d’un cours et les apprenants doivent faire des recherches pour trouver des solutions avant leur prochain cours.
QUELQUES LIMITES:
Comme toutes les autres stratégies pédagogiques, il faut éviter de donner un cours avec juste des études de cas. Les apprenants critiquent parfois cette méthode puisqu’ils ne sentent pas qu’ils sont parfaitement en mesure de distinguer les « bonnes réponses » des « mauvaises réponses » qui ont été nommées par leurs collègues. Pour utiliser cette méthode, vous devez être très alerte et rectifier constamment le tir pour éviter que les apprenants deviennent moins confiants face à leurs apprentissages.
CONCLUSION
Il existe une multitude d’autres stratégies pédagogiques qui répondent à différents besoins. Il n’y a pas de formule magique et il est essentiel de varier ses stratégies d’enseignement pour aller tirer le maximum des contenus enseignés. La variété est un élément essentiel. Prenez un instant pour penser à votre repas préféré. Vous salivez sûrement déjà juste à cette pensée, mais si je vous disais que vous allez manger ce repas tous les jours pendant 3 mois… vous seriez peut-être moins fébrile! C’est la même chose pour les stratégies pédagogiques. Si on les utilise trop, elles finissent pas nous tomber un peu sur le cœur.
Il est aussi important de ne pas laisser le choix de sa stratégie au hasard. Pour moi, toutes les stratégies ne sont pas efficaces en toutes circonstances. Il faut donc minutieusement les choisir en fonction des connaissances ou des compétences à enseigner. Vous voulez en savoir plus ? Mon infolettre est là pour vous permettre d’aller plus loin puisque c’est exactement le genre de trucs exclusifs que je partage aux abonnés! Vous pouvez vous y inscrire dans la boîte qui se retrouve au bas de cet article.
Très intéressant et bien vulgarisé! Il arrive parfois que des clients souhaitent une stratégie dont ils ont entendu parler, mais qui ne s’applique pas bien au contexte. Ton article va peut-être m’aider! Merci!
Ce n’est pas évident lorsque ce type de situation arrive. Il est important de faire valoir au client pourquoi ce n’est pas la stratégie pédagogique idéale selon le contexte et pourquoi une autre stratégie serait plus adaptée. En ouvrant le dialogue, on comprend mieux pourquoi le client veut une stratégie pédagogique en particulier. En comprenant ses motivations, il est plus facile de trouver une autre stratégie qui correspond à la fois à ses motivations et au contexte d’utilisation. Bonne chance!